top of page

  ESCAPADE SUR L’APSARAS

CONFIDENCES EN POINTS DE SUSPENSION...

33 b Mireille Vittecoq.jpg

Mireille Vittecoq 

En bref : …

 

Je suis Française d’origine mais j’habite au Québec depuis presque 49 ans …

Je suis arrivée en 1971 dans un échange d’enseignants pour un an … mais voilà , j’y suis restée …

 

Je suis retraitée de l’éducation après 35 ans de loyaux services.

Après bien des tergiversations et aventures loufoques, je me retrouve dans un petit village (tout petit) près de Mont Laurier, au doux nom de Saint-Aimé-Du-Lac-Des-Iles … je crèche sur une presqu’île, au bord du lac et … non , je ne pêche pas l’anguille ni taquine le petit poisson…( d’ailleurs, pour l’instant, le lac est encore gelé!)…

Mais de l’autre côté du chemin, vers le boisé du Mont-Daniel, je peux m’éclater dans mon atelier et m’épivarder (1) sur des sentiers à peine tracés… (je n’y rencontre personne que quelques lièvres affamés, des perdrix effarouchées et un porc-épic perché dans l’érable qu’il écorce consciencieusement)…

Alors, «confinée» depuis quelques temps déjà et faisant partie de ces «épaves» à haut risque… mon temps a «suspendu son vol» …

je devais partir en Guadeloupe, garder Icare le chien et les trois minous (Catou l’intrépide, Merlin l’enchanteur et Happy bicéphale … du moins pour les couleurs de son pelage) … pendant que mon amie Franfran allait explorer New-York et ses beautés …

Frontières fermées oblige… voyage cancellé…

 

Et j’ai commencé un carnet de voyage

un voyage virtuel

au pays de mes entrailles …

et je fais renaître des portes brûlées …

Mot québécois. Le verbe épivarder possède plusieurs significations dont celle de « se secouer pour se nettoyer les plumes (en parlant des oiseaux) ». Par extension, s’épivarder veut dire « bouger beaucoup, s’exciter ». (Note JPC)

.

Entrée dans ce journal par la petite porte ouverte par son amie Fleur Besse, Mireille ne m’a pas proposé son témoignage, mais m’a autorisé à publier des extraits des mails qu’elle m’avait adressés.

Fin avril 2020,

ESCAPADES SUR L’ASPARIAS (1)


 

Désolée! … mea culpa … j’ai désobéi au confinement !…

… et j’ai choisi de m’escapader…

Mon retour est prévu pour ce soir… si le vent est favorable et les humeurs du temps pas trop courroucées !

 

… Mais rassure toi, je te montrerai peut être un jour mon carnet de voyage et la photo de mon Apsaras, la figure de proue partie sur une vertèbre de baleine (avec une petite voile arc-en-ciel) pour mon amie Fleur, confinée à la marina sur son voilier aux Philippines…

 

… C’est vrai, j’ai pris des risques… mais tu vois, je fais partie de ces gens particulièrement vulnérables de plus de 77 ans et j’ai refusé mon admission gratuite et sans contrainte dans un CHSJARAFLD (!)…(ça m’a semblé très suspect !)

 

… Chut, ne le dis à personne, mais je me suis dit : courage, fuyons !

 

… C’est ainsi que, mon avion étant cloué au sol, je suis partie sur les ailes de papillon (j’ai choisi les ailes d’un monarque qui connaît bien la chose), pour une vie en rose, lovée dans les alvéoles d’un guêpier. J’ai dû affronter les verbes Avoir et Être qui revendiquaient eux aussi leur droit au déconfinement… j’ai dansé avec mon Apsaras (2) partie au gré des flots… et j’ai laissé passer les petits papiers mouchoirs froissés…

 

… Et de retour de ce «Voyage Au-Pays-De-Mes-Entrailles» sur le dos des oies blanches qui s’en allaient dans la bonne direction, je vais jouer dans mon jardin encore un peu gelé… à Saint-Aimé-Du-Lac-Des-Iles…

 

Bonne journée,

L’Asclépiade  (3)

1   Boutade pour stigmatiser l’acronyme les CHSLD, les Centres d’Hébergement et de Soins de Longue Durée, qui connaissent un nombre très élevé de décès durant la pandémie.

2   Dans le Sanātana Dharma (सनातन धर्म), c'est-à-dire l'hindouisme, les Apsaras sont des nymphes célestes d'une grande beauté, nées selon les légendes ou de la fantaisie du dieu Brahma ou du Rishi Daksha ou de Kashyapa

3   Les asclépiades, appelées familièrement « petits cochons », sont indispensables à la surie des papillons monarque

© Mosaïque - Jean-Pierre Coiffey 2020

33 Mireille Vittecoq.jpg

CONFIDENCES EN POINTS DE SUSPENSION…

 

 

Concernant mon carnet de voyage, c’est effectivement un VRAI carnet, bien réel (seul le voyage est virtuel)…

C’est même un vieux cahier de TP ( de Travaux pratiques) que j’ai retrouvé en fouillant dans mes archives d’un passé presque présent… (tu sais, une page blanche, une page lignée)… alors difficile de digitaliser mon cahier car… ça n’a plus du tout le même charme vois tu ?

Pas que mon carnet de voyage soit «charmant» … juste des réflexions, des dessins, des chansons, des commentaires, des blagues, des collages, des photos… de nombreuses incongruités aussi… je n’aime pas trop les sentiers battus… ni les femmes battues… ni les cours d’aquarelle…

… il faut que je feuillette, que j’hume, que j’efface, que je découpe, que je transforme, que je goûte, que ça dégoûte, que j’écoute …

… je suis une sensuelle…

… un écran, c’est juste pratique… mais ça n’a pas d’odeur…pas de saveur… et ça fait mal aux zieux…

 

Quant à mon âge ?… j’ai déjà eu 30 ans… mais là, je reçois ma pension de «vieillesse», alors pour ne pas la perdre, je ne dis rien…

Je suis une fille de la guerre (la dernière guerre mondiale, rassure toi !) , mon père sursitaire, trop jeune pour faire son service en 39, a vite épousé ma mère en 40 (arrivée d’Oran) et a fait des enfants … 5 … pour assurer la relève bien sûr.

Nous habitions un tout petit village entre Paris et Rouen.

J’ai donc commencé à me rebeller tout début 43, 11 mois après la naissance de mon frère, et j’ai beaucoup pleuré (maintenant, ça va bien, mes yeux sont plus secs, je dois même les humidifier… des larmes artificielles !)

 

Alors oui, mon compte est bon, je fais partie de ces gens «vulnérables», qui doivent rester à la maison (mais comme je te l’ai déjà dit, chut !… je triche un peu !).

Pas de changement avec mon fils (adopté d’Haïti) et de ses deux petits mousses, 13 et 7 ans, ils habitent Sept-Iles et on ne se voit pas souvent !

 

Retraitée de l’éducation après 35 ans de loyaux services, j’ai expérimenté tous les niveaux, de la classe moyenne maternelle, à l’université… mais j’ai longtemps ‘’trippé’’ (oh! ça non plus, il ne faut pas le dire !) en Abitibi, à Val d’Or, la terre des possibles… 22 ans à la Poly en Arts Plastiques… une mosaïque de 15 pieds, une crèche suspendue à l’entrée de l’auditorium en papier mâché, le plafond des sixteens, Art biblio, projet d’affiche : Forêt y penser… nous étions aussi les rois de la récup’… les vieux livres rescapés du feu, des vieilles chaises ‘’retapées’’ à notre gré… les marottes un peu pelées du cours de coiffure nous ont aussi bien inspirés…

 

… et j’ai beaucoup voyagé… mon père disait que ça formait la jeunesse…

 

… et je venais de lire ‘’l’année du lion’’ roman post-apocalyptique de Deon Meyer quand la pandémie s’est déclarée… je ne m’inquiète pas trop : le monde ne va pas tellement changer !!!

Le naturel revient toujours au galop !

 

… je m’égare, je m’égare …

 

Voilà, tu en sais un peu plus sur mon identité… je te laisse trier pour ton projet blog… Si tu as besoin d’un autre chapitre, ça va prendre une autre vie !!!

 

Je n’ai pas reçu ‘’d’attaché’’… mais je ne m’inquiète pas trop, il s’est peut être détaché (on n’a plus les trombones qu’on avait !)

 

Bonne journée, un peu tristounette ici… mais les canards sont contents.

 

© Mosaïque - Jean-Pierre Coiffey 2020

33 Mireille son lac .jpg
bottom of page